Alors que je laisse Arthur jouer tranquillement dans le sable je me suis assise pour regarder la mer. J'ai tellement envie d'y entrer à nouveau mais j'ai essayé déjà tout à l'heure et rien que de m'approcher trop près mon coeur s'est affolé.  Nostalgique, je me perds alors au fil de mes pensées.

 Repenser à tout ça, quand j'allais dans l'eau si facilement sans même qu'un adulte soit obligatoirement à côté. C'est bien loin tout ça. Même avec du monde près de moi j'ai peur.

"- Hey ! Tu pouvais m'attendre quand même !

- Non ! Ha ha !

- Rigole pas !

- Si si t'es trop marrant !"

- Nolhann... soupirai-je.  Encore un souvenir de nous, me fis-je la réflexion avant d'essayer d'approfondir. Pourquoi dès que je pense à mon enfance à présent ce sont des souvenirs où il est là.

"- Lulu, tu sais quoi?

- Quoi?

- Juju arrive demain avec Maria.

- Ah cool. Je me demandais aussi quand il viendrait.

- C'est les vacances. Mais aussi... Dans pas longtemps je vais devoir aller en vacances avec mes parents.

 - Tu t'en vas? Mais je vais être toute seule après.

- T'inquiète pas, je reviendrais.

- T'as intérêt je vais m'ennuyer sinon.

- Je te laisserais jamais toute seule longtemps."

- Qu'est-ce que j'ai pu être naïve, soufflai-je en remarquant qu'Arthur est en dessous de sa poussette, et si je vois bien il s'est endormi, je sais pas encore comment mais tu as fini par m'abandonner pour de bon. Je me suis levée pour aller confirmer que mon frère s'était bien endormi. J'ai bougé la poussette, d'ailleurs pourquoi il était en dessous c'est une bonne question.

- C'est ça quand on se réveille en pleine nuit à cause des cauchemars, on s'endort partout, mais tu as l'air malin comme ça tsss, me fis-je la réflexion en le prenant dans mes bras.

- Lucy ! M'interpelle-t-on alors que j'allais le remettre dans sa poussette.

- Tao? Qu'est-ce que tu fais là?

- Ils ont prévu une grosse chaleur, on vient passer la journée par ici. Et toi? Tu t'occupes du p'tit maintenant?

- C'est pas vraiment voulu, haussai-je les épaules, il a fait la comédie ce matin et comme j'étais là, je l'ai gardé.

- Ok.

- T'es tout seul? T'as pas ton escorte avec toi?

- Ils vont arriver.

- Je me disais aussi, bon je vais y aller alors, je veux pas les rencontrer.

- Je suis pas venu te chasser. Arrête.

- Arthur dort de toute façon, autant que je rentre.

- Tu vas bien?

- Moi? Oui, pourquoi?

- J’ai appris que tu étais allée à l'hôpital.

- Comment? Écarquillai-je les yeux. Il a pas pu le dire...

- Je sais pas à qui tu penses mais je te rappelle que le docteur Soya est mon voisin. J'ai croisé sa femme qui sortait leur chien, elle m'a dit qu'ils étaient là depuis peu et qu'il était déjà à l'hôpital, ton nom est venu ensuite.

- J'avais pas pensé à ça, dis-je en posant Arthur dans sa poussette.

- Pourquoi tu ne m'as pas appelé? Je serais venu te chercher.

- C'était rien, juste un petit malaise à cause des migraines, je suis rentrée sur mes deux pieds.

- Mais d'où te viennent donc toutes ces migraines... C'est pas la première fois.

- C'est pour ça que je dis rien à personne, ça évite les questions, je sais pas. C'est venu et voilà.

- Mais ça t'arrange quoi de te montrer méfiante avec tout le monde?

- J'y peux rien d'accord? Tu serais comment toi si tu vivais comme moi?  J'ai grandi avec une sœur qui me cherchait des poux à la moindre occasion, mes parents se fichent carrément de savoir si je suis là ou pas. Et pour couronner le tout, ajoutai-je sans la moindre hésitation, la seule fois où j'avais quelque chose à moi, elle a tout fait pour me l'enlever, voilà t'es content?

- Tu viens de parler de moi là?

- Évidemment que je parle de toi. En plus c'était peut-être pas sa première fois.

- Comment ça?

- Je suis sure de rien, mais t'inquiète pas, j'ai bien l'intention de prendre ma revanche. Ta petite copine me tape de plus en plus sur les nerfs, elle a trop abusé l'autre jour, c'était le déclic. JE vais pas la laisser me pourrir autant que Nicole a pu le faire c'est bon j'ai ma dose.

- Hein? Qu'est-ce que tu vas faire?

- Tu verras, enfin bref, c'était bien sympa de te croiser mais je vais y aller avant de croiser vampirella et compagnie.

- Tu veux que je te raccompagne?

- Non c'est bon, je parie qu'ils sont pas loin alors du coup je vais juste partir. Arthur dort en plus, je vais juste me dépêcher de rentrer en essayant de pas le réveiller et aller le mettre au lit, il a fait des cauchemars il a mal dormi.

- D'accord. Oui ils sont en haut, je t'ai aperçue, admet-il, je voulais te parler deux minutes.

- Je me disais bien aussi, d'ailleurs c'est dingue, avant on était les seuls à venir ici, depuis ils sont là aussi, abusé.

- J'admets, j'aime pas trop mais je peux pas faire autrement.

Je suis partie sans attendre, galérant autant qu'à l'allée pour rouler dans le sable, mais j'ai fais comme j'ai pu. C'est vrai que là tout de suite, j'avais vraiment pas envie qu'on me pose toutes ces questions, il avait réussi à me faire sortir de mes retranchements. Puisque c'est comme ça alors oui je vais commencer, après tout, j'ai une porte d'entrée dans leur monde non? J'ai un début de sympathie avec Swann, je m'entends pas plus mal que ça avec Eloys même s'il a l'air de rien avoir à faire de tout. Nolhann, il s'en veut pour autre chose donc ne dira rien si je m'approche en plus ça va me permettre de mettre les choses au clair avec lui.

- Dans ces conditions, marmonnai-je, je vais finir par te faire redescendre sur terre Sarah-Jane. Je n'ai pas pu le faire à Nicole parce qu'elle était trop bien entourée, alors je vais faire exactement ce qu'il faut, tu règneras plus pour longtemps, ça c'est une certitude.

- Tu m'as parlé? Me lance Tao.

- Non non, je réfléchissais à haute voix !

Arthur s'était réveillé puis rendormi sur le chemin jusqu'à la maison, de ce fait il dormait encore en arrivant. Je l'ai donc pris dans mes bras doucement pour aller le mettre au lit, il y serait mieux que dans sa poussette même si ça ne dure que dix minutes.

Je me suis rendue compte d'une voix sortant de la chambre de mes parents, celle de ma mère. Elle était à la maison étonnamment, je la croyais occupée.

Après avoir mis au lit Arthur je suis donc allée la voir.

- Maman?

- Ah te voilà, où est ton frère?

- Il dormait je l'ai mis au lit.

- Bien.

- Pourquoi t'as sorti une valise? Remarquai-je alors qu'elle continue de faire je ne sais quoi sur son portable.

- Ah oui, d'ailleurs je t'ai envoyé un message.

- J'ai pas mon téléphone, il recharge, alors quoi?

- On va partir quelques jours, un ami de ton père est à l'hôpital, on doit aller soutenir la famille.

- Pourquoi quand tu dis on, j'ai l'impression que je ne fais pas parti du voyage?

- Parce que c'est le cas, tu restes ici. Tu n'as pas besoin de venir.

- Je fais pas parti de la famille? Tu vas emmener Arthur j'imagine.

- Parce qu'il est petit et qu'il faut qu'il soit avec nous si on doit partir un moment, dit-elle en passant à côté de moi pour sortir de la chambre, je lui emboite aussitôt le pas.

- Et alors?

- Alors rien, c'est prévu comme ça, on part tu restes.

- Si j'avais pas eu Arthur avec moi en fait vous seriez partis sans même me parler?

- Je sais pas , c'est possible.

- Vous serez partis combien de temps au juste?

- J'en sais rien Lucy, tu verras bien. Ca dépendra de la santé de son ami.

- Ok. Mais je vais me retrouver toute seule pendant tout ce temps?

- Oui et commence pas à râler, j'ai autre chose à faire.

- Je râle pas je constate !

- Si tu n'as plus de questions j'aimerais finir ça.

- J'en ai encore, vous partez quand?

- Aujourd'hui, le plus tôt possible. Dès que ton père rentre de sa plaidoirie.

- Si rapidement?

- Oui, on a pas de temps à perdre.

- Et vous avez prévu de me laisser de quoi faire des courses au moins?

- Ton père s'en occupe, on mettra ce qu'il faut sur ton compte et en cas de besoin on refera un virement, bon tu me laisses maintenant?

- Ça vous pose vraiment pas de problèmes de me laisser derrière vous, je vois que t'as déjà tout prévu.

- Lucy, vraiment là tu m'ennuies, j'ai d'autres choses à faire.

- Je t'ennuie peut-être mais bon je comprends pas comment tu agis avec désinvolture.

- Écoute tu as vraiment pas l'âge de suivre tes parents alors arrête.

- Là je suis tout à fait d'accord, mais bon on aurait au moins pu en parler, là tu me mets devant le fait accompli et c'est ça qui m'agace.

- C'est comme ça j'ai pas le temps de réfléchir.

- Bref, je vais me changer, je vais ressortir.

- Prends ta clé au cas où on serait déjà partis.

- Vous allez pas partir sans me voir quand même.

- On part dès que ton père est là.

- Ouai bah j'ai compris va.

Un peu de solitude, j'étais vraiment pas contre, ce qui m'a fait prendre la mouche inutilement c'est qu'elle me mette devant le fait accompli. Je sais pas moi, au moins me demander si je voulais venir ou pas. Mais bon, je rêve encore d'avoir une famille qui communique.